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Cour pénale spéciale en RCA : Bozize, Djotodja et Nourredine Adam d’abord s’il vous plaît

« Tant que les principaux auteurs instigateurs du drame centrafricain seront en liberté, et qu’ils pourront continuer d’armer, de financer et de pousser leurs éléments au massacre, les utilisant comme moyen de pression pour être toujours associés à la gestion du pays ou revenir au pouvoir, la crise centrafricaine ne sera jamais résolue. »

C’est une citation tirée de mon livre « L’autre version de la crise centrafricaine ». Une phrase que je m’égosille voilà bien des années déjà, à crier sur tous les toits, mais je dois me rendre à l’évidence : Ma petite voix de journaliste centrafricain est étouffée par celles plus fortes des propagandistes de tous poils qui sévissent ça et là, dans les médias de masse et sur internet. Une voix perdue dans un océan de falses flags agités dans le but de détourner les regards du vrai problème, et laisser perdurer la crise…

Qui se cache derrière les tueries de Bangassou et Bambari ? Arrêtez Bozizé et Djotodja et vous aurez la réponse 

Pendant que les médias s’évertuent à donner le nombre de victimes musulmanes et chrétiennes de la prétendue guerre de religion en RCA, personne ne s’est un seul instant posé la simple question suivante. Comment des villageois d’un pays qui se situe en dessous du seuil de la pauvreté, des gens qui arrivent difficilement à dépenser 1 dollar par jour pour manger, peuvent acheter des armes lourdes et sophistiquées pour tenir en échec les forces onusiennes et faire des centaines de morts à Bangassou ?

Qui donc est derrière les tueries de Bangassou ? Elémentaire, posez la question à François Bozize, il connaît la réponse. Qui met Bambari à feu et à sang ? Demandez à Nourredine Adam, Ali Darass et Michel Djotodja, ils ont la réponse. Mieux encore, qui protège ces fauteurs de trouble en RCA? Qui a peur qu’on entende devant un tribunal les versions des sieurs Bozize et Djotodja ? Que faut-il au bureau du procureur de la Cour Pénale Internationale pour poursuivre les présumés auteurs de crimes de guerre et de crime contre l’humanité en RCA? Jean-Pierre Bemba Gombo est jugé à la Haye pour des crimes de guerre commis en Centrafrique lors des événements où le nom de Bozize était déjà cité. C’était lui le Chef d’état major de Patassé qui a fait appel aux hommes de Jean-Pierre Bemba pour venir à la rescousse du pouvoir de Bangui lors des événements de 2001.

Il va sans dire que les auteurs de crimes de guerre sur des centrafricains (en dehors de Jean-Pierre Bemba) n’intéressent pas grand monde. Vous avez dit bizarre ? Voyez plutôt, la CPI ne s’est pas faite priée quand il s’est agi d’arrêter Laurent Gbagbo, aussitôt renversé par les forces nouvelles d’Allassanne Dramane Ouattara. La CPI n’a pas hésité à convoquer pour l’entendre un Chef d’état africain en exercice, en l’occurrence Ohuru Kenyata du Kenya. Pourquoi après tous les massacres commis par les milices Seleka et antibalaka, la CPI qui, un moment a finalement déclaré qu’elle ouvrait une enquête sur les crimes commis en Centrafrique n’a jusque-là, ne serait-ce que demander d’auditionner Djotodja ou Bozize ? Les bruits courent à Bangui, parmi les Lieutenants de Bozize, que son retour est imminent. Pas question qu’ils passent devant la Cour pénale Spéciale de Bangui, alors ils reprennent les armes. C’est la bonne vieille recette que ces desperados ont toujours servi aux centrafricains : prendre les armes, faire couler du sang innocent pour obtenir ce qu’ils veulent.

Cour pénale spéciale à Bangui :Poudre aux yeux et solutions éphémères ?

La Cour pénale spéciale sera encore de la poudre aux yeux si elle vient juste pour juger les petits poissons qui s’agitent sur le terrain en RCA, ceux-là sont remplaçables. Les véritables Chefs de guerre, ceux qui tirent les ficelles pourquoi ne sont-ils pas inquiétés ? Pourquoi la justice centrafricaine et la cour pénale internationale n’émettent pas de mandats d’arrêts contre messieurs Bozize et Djotodja pour les entendre ? Ils vivent respectivement en Ouganda et au Benin. Et à ce jour, tous les anciens Lieutenants de Bozize sont retournés à Bangui. Le fils aîné et Ministre délégué à la Défense de Bozize, Jean-Francis Bozize fait partie de ceux qui sont retournés au pays et qui estiment que le Président Archange Touadera leur est redevable pour avoir été nommé Premier Ministre par leur père et Champion. Les caciques du KNK ont maintes fois réclamé le retour et la participation de Bozize aux dernières présidentielles. Tant que Bozize et ses Lieutenants seront en liberté on peut faire une croix sur la paix, ils chercheront toujours par tous les moyens à reprendre le pouvoir et éviter de passer à la barre. Cet homme a convoité le pouvoir depuis qu’il était aide-camps de l’Empereur Bokassa, c’est l’Iznogoud centrafricain, il a tenté un coup d’état contre André Kolingba, avant de réussir à la troisième tentative contre Patassé. Il nous a déjà démontré longuement qu’il est prêt à tout pour prendre le pouvoir et le conserver.

Michel Djotodja de son côté estime qu’on ne peut aller vers une réelle solution sans sa participation et joue des coudes pour revenir dans la danse. Quand à Nourredine Adam, l’ancien ennemi public numéro un, il sillonne tranquillement la sous-région et depuis le Tchad voisin pilote des opérations à Bambari. Deux Chefs de la Seleka, les tristement célèbres Haroun Gaye et Abdoulaye Hissein, après en avoir fait voir de toutes les couleurs aux habitants du PK5 , ont quitté Bangui dans la nuit du 15 Août 2016 à bords de véhicules blindés, franchi la barrière du Pk12 en échangeant des tirs avec les éléments des forces de défenses et de sécurité. Arrêtés dans leurs progressions vers Sibut par la MINUSCA, ils ont finalement été relâchés pour se retrancher dans l’arrière-pays alors que des mandats d’arrêts ont été émis contre eux pour des crimes graves. Des crimes qu’ils peuvent continuer impunément à commettre en province. Je pourrais aussi citer Abdel Kader Baba-Ladé, Chef rebelle Tchadien qui après des années d’exactions en RCA (viols, incendies de villages, assassinats, vols de bétails, enrôlement d’enfants etc.), a été contraint de se rendre aux autorités de Bangui qui l’ont aussitôt extradé dans son pays où il a été nommé Gouverneur de région. Plus tard il prend la fuite, et est arrêté une deuxième fois en Centrafrique par les forces internationales, il est extradé une deuxième fois au Tchad, sans jamais avoir été inquiété par aucune justice.

D’ailleurs parlons-en du Tchad voisin

Depuis deux décennies, Idris Deby est le faiseur de rois en Centrafrique avec la bénédiction de la France. Deux pays voisins, deux pays frères, deux présidents, avec des destins différents. Le 1er Décembre 1990 Idris Déby renverse Hissein Habré et devient le nouvel homme fort du Tchad, 3 ans plus tard Patassé gagne les élections en Centrafrique face au Général Kolingba. Seulement tout bascule pour l’un, Patassé décide de revoir les accords de défense et ceux qui concernent les exploitations du sous-sol signés au début des indépendances. Les forces françaises quittent donc la RCA pour le Tchad voisin où elles vont constituer la plus grande base militaire française de la sous-région. En fuite au Tchad, suite à une convocation des juges pour l’entendre dans une affaire de tentative de putsch, le Chef d’Etat-major de Patassé, le Général François Bozizé, revient pour prendre le pouvoir avec l’appui du Tchad. Bon élève Bozizé, organise deux élections et les gagne, avant de commencer à marcher dans les sillages de Patassé. Il enchaine tour à tour : Plainte contre le rachat d’Uramine par Aréva (la fameuse affaire dans laquelle près de deux milliards d’euro du contribuable français se sont volatilisés), rapprochement avec la Chine pour le pétrole dans la région de Borotama à la frontière du Tchad, rapprochement avec l’Inde pour l’exploitation du ciment, accord de défense avec l’Afrique du Sud pour assurer sa protection après s’être brouillé avec le Tchad. Alors la Seleka, une coalition de rébellion venant du Tchad et du Soudan, ratissant tout sur son passage renverse Bozize.

Avec l’appui du Tchad dans la lutte contre le terrorisme notamment au Mali et dernièrement au Cameroun et au Nigeria, Idriss Deby devient l’homme incontournable que la France et la CEMAC, voire l’Union Africaine laissent agir comme bon lui semble.

Guerre de religion en Centrafrique ? Changez de disque s’il vous plaît

Il y a une semaine, en bas de mon immeuble un homme m’a demandé en sango (langue nationale de la Centrafrique) si j’étais un de ses compatriotes. Je portais un tee-shirt floqué du drapeau de la RCA, qui a attiré l’attention de ce centrafricain musulman. On a vite sympathisé et échangé nos numéros dès qu’on a su qu’on avait habité tous les deux le Km5 à Bangui. Depuis, il nous arrive de parler de ce qui s’est passé au pays, dans notre quartier, des jeunes qu’on connaissait et qui sont morts pendant ces événements etc. C’est ce qui se passe un peu partout quand des centrafricains se croisent.

Je défie quiconque de me donner un seul exemple d’affrontement, invectives ou bagarres rangés entre centrafricains musulmans et chrétiens réfugiés au Tchad, au Cameroun, au Sénégal, en France etc. Pourtant ils ont quasiment tous perdu un proche dans cette crise. Mais ces personnes savent qu’elles sont toutes victimes de quelque-chose qu’ils ne s’expliquent pas eux-mêmes. Cependant, il suffit que les antibalaka attaquent une ville pour que le lendemain tous les médias nous donnent le nombre de victimes musulmanes massacrées lors d’affrontements « interreligieux » en RCA, et vice-versa quand c’est la Seleka qui attaque, on donne le nombre de victimes chrétiennes.

Alors quand j’entends des pseudo-spécialistes, photographes, humanitaires etc, des gens qui parce qu’ils sont allés passer quelques semaines en RCA et ont ramené des photos de personnes mortes, débiter des contre-vérités dans les médias et parler de guerre de religion, thèses qui occultent les vraies raisons de la crise centrafricaine et empêchent ainsi d’allumer les projecteurs sur les vrais auteurs ; Je me dis que la propagande a encore de beaux jours devant elle.

De sources concordantes sur le terrain en Centrafrique, Bangui risque de connaître dans les tous prochains jours une attaque similaire à celle de Bangassou. Une attaque imminente qui a pour but le retour au pouvoir des personnes qui y ont déjà goutté, et qui pensent détenir le titre foncier du pays…


L’ex-Katanga en RDC: les enfants de 10 ans sont des survivants de la rougeole

« Nous avons enregistré 30 cas de rougeole la semaine passée, et cette semaine, en deux jours seulement nous en avons déjà eu six. »

L’homme qui parle est le Chef du centre de santé de Kizyuki. Un village situé à 97 kilomètre de la ville de Manono dans l’ex-province du Katanga, en République Démocratique du Congo.

Jean-Claude accueille dans l’enceinte du centre de santé, l’une des équipes de Médecins Sans Frontières Suisse, chargée de vacciner contre la rougeole les enfants des 27 aires de santé que compte Manono.

Kizyuki est notre première escale pour rejoindre les équipes de vaccination parties la veille à Katchambuyu Kabenge. Avant d’atteindre Kizyuki nous avons parcouru 6h de route en moto, à rouler tantôt dans du sable, tantôt sur une piste accidentée qui serpente à-travers de hautes herbes qu’on prenait de plein fouet sur nos casques. Nous avons traversé un fleuve en pirogue, marché dans des marais pour enfin tomber sur un village au milieu de nulle-part. Des milliers d’âmes y vivent coupées du reste du monde. Sans eau courante, sans électricité, sans téléphone, rien.

Sur un ton impassible, le regard perdu dans le vide, Jean-Claude poursuit son explication « nous n’avons pas beaucoup de cas de mortalité ici au niveau du centre. C’est dans la communauté qu’il y a beaucoup de décès » … Il met en cause l’ignorance de la population qui ne veut pas se rendre dans le centre de santé et préfère prendre des traitements traditionnels.

– Mais pourquoi viendraient-ils ? Il n’y a presque rien dans le centre de santé…Jean-Claude se rebiffe, se justifie et finit par reconnaître qu’en temps normal les consultations sont payantes. C’est la raison pour laquelle les villageois ne veulent pas emmener leurs enfants au centre de santé. Aujourd’hui avec l’appui de MSF, ils peuvent prendre en charge gratuitement les cas de rougeole… avant d’ajouter désespérément « Mais malgré cela ils ne viennent pas, il y a encore beaucoup de décès à la maison… »

D’autres pathologies telles la malnutrition et le paludisme se greffent à la rougeole et sont les principales causes de mortalité chez les enfants. Ne disposant ni de médicament, ni de matériels sanitaire Jean-claude réfère les cas compliqués à l’hôpital de référence à Manono situé à 97 km. Problème : il faut transporter le malade déjà grabataire jusqu’en ville sur une bicyclette. Trouver une moto pour transporter le malade tient presque de l’exploit. Les villageois désarmés face à ces insurmontables obstacles pour atteindre le centre-ville, ensuite payer la consultation puis les médicaments, préfèrent se tourner vers les guérisseurs traditionnels. J’ai vu des enfants souffrant d’infections provoquées par des lavements rectaux, et d’autres complications dû à des mélanges de plusieurs décoctions.

En écoutant Jean-Claude, je réalise qu’au delà des reliefs qui bordent nos horizons, là-bas, derrière les monts, les fleuves et marais il y a énormément de vies à sauver et je ne suis pas mécontent d’avoir franchi tous ces obstacles pour m’en apercevoir. Je remonte sur ma moto impuissant, abandonnant Jean-Claude et son petit hôpital. Des enfants saluent et crient à notre passage, « ceux-là, ce sont des survivants » me dira le lendemain une infirmière….Prochaine étape, le village de Katchambouyou Kabangue où la veille 78 motos sont parties avec des vaccins.


Immigration : l’Europe craint l’invasion des extra-terrestres

Je me suis rendu à la manifestation de soutien aux migrants expulsés manu militari sous le métro aérien du boulevard de la Chapelle, pas vraiment dans le but de manifester, mais j’ai voulu comprendre ce qu’il se passait. Ces derniers jours, le débat politique, les Unes des journaux et l’opinion publique en général se sont polarisés sur la problématique des migrants. On en parle comme de l’invasion des extra-terrestres. L’Europe a peur des migrants… J’ai voulu comprendre cette psychose qui s’est emparée de la population.

Manifestation de soutien aux migrants du boulevard de la Chapelle.

Qui sont les migrants du boulevard de la chapelle ?

En quittant la manifestation, je suis allé discuter quelques minutes avec l’un de ces migrants. Il vient de l’Érythrée. Une dictature militaire dirigée d’une main de fer depuis deux décennies par Issayas Afewerki. En 2012 et 2013, l’équipe nationale de football profite des rencontres internationales pour demander l’asile politique en Ouganda et au Kenya. L’athlète qui représente l’Érythrée aux Jeux olympiques de Londres demande l’asile politique, et la même année le ministre de l’Information de ce pays profite d’une mission en Allemagne pour s’exiler. Pour l’Erythréen lambda, sortir du pays tient presque de l’exploit. Ce pays est une prison à ciel ouvert, les militaires ont ordre de tirer à vue sur ceux qui tentent de passer la frontière. Ces jeunes fuient entre autres le service militaire à durée indéterminée, les travaux forcés, etc. Asmara bafoue tous les droits humains et les libertés individuelles. Depuis plusieurs années ce pays arrive en dernière place au classement mondial de la liberté de la presse et détient le record du plus grand nombre de journalistes emprisonnés sur le continent africain.

Avant la crise libyenne, les réfugiés érythréens en quête d’un avenir meilleur n’avaient que le passage du Sinaï. Une zone de non-droit entre l’Égypte et Israël, où ils sont souvent kidnappés, vendus et revendus comme esclaves. Certains finissent dans des fosses communes et ce n’est qu’une toute petite partie qui arrive aux portes de l’Europe.

L’Otan et la piste libyenne

Quand Nicolas Sarkozy a eu l’outrecuidance de sortir son allégorie de la fuite d’eau, en parlant des migrants, je me suis dit que quelqu’un devrait lui rappeler que le passage libyen a été ouvert grâce à sa petite guéguerre menée contre Mouammar Kadhafi. Heureusement pour l’Espagne que le Maroc n’a pas connu les joies du  » printemps arabe  » , autrement le détroit du Gibraltar et les côtes espagnoles connaîtraient les mêmes flux migratoires que la péninsule italienne. La guerre a un coût et ces Messieurs de l’Otan qui ont déstabilisé toute une région n’ont pas pris le soin de mener leurs actions jusqu’au bout en instaurant des États de droit et la stabilité dans ces régions. Au lieu de surfer sur la vague du populisme pour ratisser l’électorat de l’extrême droite, certaines personnes devraient faire profil bas vu leurs actions par le passé qui contribuent à la situation désastreuse actuelle.

Face à la crise économique dans la zone euro et probablement à cause de la recrudescence du terrorisme, nous assistons à une montée en puissance des mouvements d’extrême droite qui désignent les migrants comme l’un des pires problèmes auxquels l’Europe est confrontée. En France où la gauche est au pouvoir, le gouvernement essaie de durcir le ton pour montrer à la population qu’il ne reste pas les bras croisés comme l’insinue l’extrême droite. C’est une véritable guerre de déclarations chocs par médias interposés.

L’Europe submergée par les migrants ?

Le Liban, le Pakistan, l’Iran et la Turquie arrivent en tête des pays qui reçoivent le plus grand nombre de réfugiés. Ces pays reçoivent des millions de migrants qui sont la conséquence des guerres qu’ils n’ont pas déclenchées. Le Liban accueille des millions de réfugiés syriens. Paradoxalement l’Occident qui mène des guerres et vend des armes, panique et s’affole parce que quelques milliers de réfugiés fuyant ces guerres arrivent sur ses terres.

En prétextant la destruction d’armes biologiques et le combat contre des régimes totalitaires, Georges W. Bush, Dick Cheney, Nicolas Sarkozy et compagnie ont mené des politiques va-t’en guerre, déstabilisé des régions entières, sacrifié des vies innocentes, brisé des familles, etc. Aujourd’hui personne ne leur demande des comptes, et même certaines personnes qui s’affolent i face à l’afflux des réfugiés ont salué ces guerres. Certaines personnes qui ont peur que des Libyens viennent prendre leur boulot ont pourtant acclamé l’invasion de la Libye.

Le migrant du pont de la chapelle avec lequel j’ai discuté ne parle pas français, ne sait même pas ce qu’est une allocation. Il ne veut pas demander l’asile en France, sa prochaine étape ? L’Angleterre. Là-bas y’aurait du boulot, même pour les sans-papiers, me dit-il avec une lueur d’espoir que je n’avais pas envie de briser en lui expliquant que des milliers de gens dans son cas attendent à Calais pour avoir la chance de passer outre-Manche…

Invité par Médecins du Monde Espagne pour faire un exposé lors d’une conférence sur l’immigration et l’intégration à Palma Majorque, j’ai demandé s’il y avait des migrants dans la salle… Il n’y en avait pas, j’aurais pu leur demander s’ils avaient franchi tous ces obstacles pour venir sombrer dans la prostitution, la drogue et la délinquance ? Beaucoup de pays sont le fruit de l’immigration : Les États-Unis, les Antilles, etc. Depuis la nuit des temps, les humains vont et viennent sur toute l’étendue de la terre pour une raison ou pour une autre.

Actuellement, l’Europe parle des migrants avec tous les stéréotypes qui vont avec, et surtout sans les associer. Ils sont exclus des débats. Tout ce qu’on voit en eux ce sont des réfugiés, des problèmes qu’il faut résoudre.

Le jour où on les verra comme des humains qui ont une éducation, une histoire, des potentialités qu’ils peuvent mettre au service du pays d’accueil, l’immigration pourra être expérimentée comme une chance tant pour le pays d’accueil que pour l’immigré.

Je sais ce que c’est que d’être réfugié, de tout perdre du jour au lendemain, de vivre avec certaines angoisses… Mais plus encore combien il est difficile de tourner la page et d’essayer de vivre une autre vie malgré tout… avec des stigmates et les clichés qui ont la vie dure. Même si on avait du mal à se comprendre, j’ai quitté l’Erythréen avec le sentiment d’avoir discuté avec un humain, qui n’a rien d’un extra-terrestre…IMG_3595


Abus sexuels sur mineurs en RCA : aucun problème tant que les victimes sont des filles ?

Cette vague d’indignation qui a suivi les révélations de viols d’enfants centrafricains par des soldats français, tchadiens et équato-guinéens commence sérieusement à m’agacer.

Je peux comprendre la réaction des gens qui n’ont jamais vécu en Centrafrique, mais j’enrage face à l’hypocrisie des politiciens et juristes centrafricains. Je fulmine face à l’hypocrisie des acteurs de la solidarité internationale ayant vécu ou vivant encore en Centrafrique. Vous n’avez jamais été au courant que des mineures sont régulièrement violées dans ce pays ? Laissez-moi vous rafraichir la mémoire.

Commençons par ce phénomène qui ne choque plus personne: les « gba-moundjou » je traduis presque mot à mot « Baise Blanc ». Ce sont des jeunes filles, souvent d’à peine 16 ans qu’on retrouve dans les boîtes de nuit de Bangui. Leurs clients réguliers sont des expatriés : Baracuda (nom donné aux militaires français depuis l’opération Barracuda qui a chassé l’empereur Bokassa du pouvoir), les coopérants, forces de maintien de la paix, personnels des ONG, etc. Seuls ces humanitaires et fonctionnaires expatriés peuvent s’offrir le luxe d’acheter une bouteille de whisky à vingt cinq mille francs CFA (environ 40 euros), et donner autant à la fille qu’ils ramènent chez eux. Le tout égale le salaire mensuel d’un fonctionnaire moyen. Tout le monde peut les voir partout avec ces Escort-girls bon marché qui sont plutôt fières de s’afficher avec des Blancs. Plus tard d’autres filles ont été surnommées Cémac parce qu’elles allaient régulièrement rendre visite aux soldats de la Communauté économique et monétaire de l’Afrique centrale basés au camp M’Poko pour le maintien de la paix.

« Foutage de gueule »

Deux mois après le coup d’Etat de la coalition Seleka, j’animais une émission avec Igor Ouaina du Réseau national des organisations de jeunesse en droit de l’homme. Nous avions recueilli les témoignages anonymes d’adolescentes victimes de viols par les miliciens seleka. Ce réseau avait travaillé avec l’ONG COOPI (Coopération italienne), et négociait aussi une collaboration avec le Danish Refugee Council qui finançait le centre d’écoute et d’orientation du Réseau des femmes juristes de Centrafrique.

Alors si le parquet de Bangui n’a jamais été mis au courant des viols sur de jeunes filles centrafricaines, soit ces ONG qui déboursaient beaucoup d’argent pour la prise en charge et l’orientation des victimes de viols n’ont jamais fait leur travail, soit l’actuelle indignation de tous ces acteurs est tout simplement du « foutage de gueule ».

L’ONU s’indigne ? Bonne nouvelle, j’en profite donc pour lui demander d’ouvrir une enquête sur le général tchadien Baba-Ladé qui a commis les mêmes exactions que les hommes de Jean-Pierre Bemba, aujourd’hui jugé à la Cour pénale Internationale. Baba-Ladé et ses hommes ont violé, tué, brûlé des villages en Centrafrique. Il est reparti sans être entendu par un juge dans son Tchad natal, pour être nommé préfet. En 2014, démis de ses fonctions après s’être brouillé avec Idriss Déby il a été appréhendé en RCA et remis une seconde fois aux autorités tchadiennes par les forces internationales qui travaillent en RCA sous mandat onusien

Messieurs de l’ONU et des ONG internationales des mineures ont toujours été baisées en RCA par certains de vos personnels. Messieurs les politiciens centrafricains, des femmes ont été régulièrement violées lors des innombrables soubresauts dont vous êtes les principaux auteurs. Messieurs des forces de maintien de la paix, certains d’entre vous ont au vu et au su de tous abusés des filles en échange d’un peu d’argent ou de nourriture.

En Centrafrique, une famille sur dix a un réfrigérateur. En général on n’a pas de réserve de nourriture, et même si on en avait pendant que ça tire et que ça pille de partout, il ne reste plus rien à manger. Ces enfants se prostituent et se sacrifient souvent pour nourrir toute une famille. Tout le monde est au courant. Alors le coup de l’indignation hypocrite, faudra repasser… à moins que vous vous indigniez juste parce que cette fois-ci les victimes sont de petits garçons ? On attend des actes, des mesures concrètes, mais de grâce arrêtez de nous bassiner avec ces déclarations hypocrites.

 


Et si j’étais né dans une famille musulmane ?

 

La semaine passée j’ai assisté à une scène que j’avais déjà vécue dans le métro parisien le 8 janvier 2015. C’était au lendemain de l’attaque contre Charlie Hebdo, tout Paris était encore sous le choc.

Je me rendais à un rendez-vous. Le trajet se déroulait sans problème jusqu’à ce qu’un jeune homme monte dans le wagon où je me trouvais. Il était barbu, avait le teint basané et portait une djellaba. Un silence pesant s’installa tout d’un coup, presque tous les autres passagers le fixaient avec méfiance.

Donc le jeudi dernier la même scène se répète un jour après l’arrestation par la police de Sid Ahmed Glam. Cette fois, il s’agissait d’un homme âgé, barbu et habillé en djellaba. De la pure provocation ? C’est alors que je me suis demandé si un Noir aux cheveux crépus et portant un pantalon jean avait la veille ouvert le feu sur des journalistes sous prétexte de venger le dieu des Noirs, allais-je changer mon habitude vestimentaire pour éviter tout amalgame ? Certainement pas.

Ce soir, j’ai une pensée particulière pour le musulman lambda qui a les mêmes préoccupations que tout le monde, qui ne pense qu’à vivre sa vie, à faire son devoir de père ou mère de famille, etc. De simples citoyens, victimes de la vision manichéenne du monde.

Je me souviens qu’avec mon ami Ahmat on faisait les 400 coups ensemble. Adolescents on allait les dimanches soir à la messe pour courtiser les filles à la sortie de l’église. Pendant le ramadan, tous les soirs on faisait ripaille chez lui à l’heure de la rupture du jeûne. Ses sœurs savaient qu’on buvait de l’alcool en cachette, prétextant de passer la nuit chez moi pour faire des révisions on en profitait pour faire des escapades à la kermesse. Son père exigeait qu’il aille à la mosquée, je l’y accompagnais sans problème.

Aujourd’hui, les gens mettent systématiquement Ahmat dans l’autre camp, celui des musulmans de Centrafrique et moi aussi sans demander mon avis on essaie de me mettre dans un camp.

Je connais un couple de journalistes réfugiés syriens que tout le monde classerait dans la catégorie « arabe », donc par voie de conséquence « musulmane ». Sauf que tous les deux bien que parlant à la perfection l’arabe qui est leur langue maternelle sont des athées.

J’avoue que si j’étais né dans une famille musulmane, cela me ferait « vraiment me faire chier » que les gens voient en moi un potentiel terroriste parce que des barbares massacrent des innocents au nom de la religion à laquelle j’appartiens.

Ce soir je pense à mon ami Ahmat qui n’a rien à voir avec la Seleka, et à tous les musulmans qui n’ont rien à voir avec Daesh. Je réfléchis à cette classification des humains en chrétiens, musulmans, athées, etc. Et ce texte que j’avais écrit il y a quelques années me revient à l’esprit:

Il y’a de plus en plus d’étrangers sur terre
A tous les niveaux, l’homme érige des barrières
Le pire c’est qu’à cause de ces frontières
Il en arrive à massacrer ses congénères

A ce rythme où va le monde
Si les brunes doivent tuer les blondes
Et  ceux qui prient Dieu à genoux
Massacrer tous ceux qui prient debout

De deux choses où le monde est peuplé de fous
Ou HOBBES a raison l’homme n’est qu’un loup
Qui guette son voisin pour lui sauter au cou
Simplement parce qu’il est différent, quels ploucs !

Il y’a vraiment de quoi à s’inquiéter
Pour l’avenir de l’humanité
C’est Dieu qui a créé le monde hétérogène
Allez-vous en prendre à lui si cela vous gêne

 

 

 

 


Journalisme show-biz et bimbos : le récit de ma soirée d’applaudisseur

Lundi midi je mangeais au Macdo situé en face de la fontaine des Innocents à Châtelet quand une jeune femme sympathique m’aborde. Elle me propose de participer à l’enregistrement d’une émission de télévision. En contrepartie la boîte de casting pour laquelle elle travaille m’offrait des places de spectacle.

Il s’agit d’une émission consacrée à l’actualité et présentée par une équipe de jeunes chroniqueurs.

Pourquoi pas ? Je n’avais rien prévu de spécial pour ma soirée du mardi et c’était l’occasion de voir comment se passe une émission en étant dans le public.

Donc la demoiselle m’inscrit et me donne quelques consignes : je devais arriver à l’heure, porter des vêtements sans marque visible, etc., jusque-là, tout va bien.

L’enregistrement étant prévu à 20 h, j’arrive à 19 h 55, me place dans la queue, et attends comme les autres. Une demi-heure plus tard, nous sommes invités à entrer dans le studio, et à nous installer. Le réalisateur nous fait un briefing. En gros notre travail consistait à sourire et surtout applaudir quand il nous le demande, et uniquement dans ces cas-là. Tout le reste du temps, nous devions éviter de faire du bruit.

Cette mise au point faite, il nous donne la primeur de l’enregistrement. On procède à une séance d’acclamation, d’abord très fort, puis avec grand sourire, ensuite on devait ovationner comme si on était au stade.

Les choses sérieuses commencent. On acclame l’arrivée sur le plateau et le lancement de l’animateur. J’ai ainsi applaudi une bonne cinquantaine de fois pendant cette soirée. L’enregistrement qui devait finir à 23 h est allé bien au-delà, les chroniqueurs voulaient parfois reprendre leurs papiers estimant qu’ils n’avaient pas exécuté leurs tirades comme ils le souhaitaient, et pour cause ! On reprenait aussi les applaudissements autant de fois, jusqu’à ce que la personne soit satisfaite de sa prestation.

Des études de journalisme pour devenir bimbo ?

Pause clope, on sort prendre l’air, les chroniqueurs entre eux et le public aussi. Je discute avec un jeune homme et deux jolies filles habillées comme des mannequins. Je leur dis que ce soir j’ai vu des vedettes plus préoccupées par leur image et à faire le show qu’à faire du journalisme. Non pas que le contenu de l’émission soit mauvais, loin de là, mais je pense que ce travail consiste d’abord à donner de l’information. Ma conception du journalisme est peut-être trop idéaliste, mais pour moi ce métier est totalement différent du show-biz. Nous avions failli entrer dans une discussion houleuse sur le rôle du journaliste. Les filles m’apprennent qu’elles sont étudiantes en journalisme…

Fin de la pause, retour en salle, sur les coups de minuit plusieurs personnes parmi le public habitant en banlieue décident de rentrer de peur de rater le RER.

J’espérais continuer le débat avec les étudiantes en journalisme jusqu’au métro, mais elles sont restées pour prendre contact avec l’équipe de l’émission à la fin de l’enregistrement…Elles cherchaient un stage. Au moins j’ai eu le temps de dire ce que je pensais du vedettariat au sein de la corporation à deux possibles futurs bimbos de la télévision… Non, mais pourquoi faire des études de journalisme si le but est d’en mettre plein la vue aux téléspectateurs (trices) et de s’entendre ovationné par une bande d’applaudisseurs qui s’exécutent à la demande ? Prenez des cours de musique ou de cinéma vous avez plus de chances de devenir stars.

 


Entre l’Africain et son homme politique, c’est comme dans 50 nuances de Grey

« Non mais si tu regardes dans les clubs sado-maso, y a que des Blancs… » Ben attends, les Noirs se sont fait fouetter pendant 400 ans, ils vont pas revenir en disant : « Oh, c’est sympa ici ! »

Cette tirade de Fabrice Eboué lors d’un stand-up au Jamel comedy club m’a beaucoup amusé, mais aujourd’hui, j’ai envie de dire – tu te trompes Fabrice, en politique plus ça fait mal, plus l’Africain en redemande.

C’est fou, mais plus le tyran africain se contrebalance royalement du sort de ses administrés, plus ces derniers donneraient leur vie pour lui. J’ai envie de dire sans jeu de mots raides que l’Africain aime son homme politique profondément, bien sec et sans vaseline. Vous avez vu le nombre d’Africains qui se battent bec et ongles pour éviter la prison à des gens qui les ont massacrés ?

La guerre fait rage sur Internet

J’avais publié un billet sur les commentateurs d’articles sur le web, aujourd’hui, je vous propose de jeter un regard sur le nombre de billets d’humeur, de tweets, de posts sur Facebook qui défendent les responsables de milliers de morts en Afrique.

Nous avons affaire à des internautes « militaro-manichéen ». Ils ne se compliquent pas la vie ; pour eux l’information politique c’est comme à l’armée. C’est-à -dire deux camps adverses. Il y a les bons, c’est le camp du politicien qu’ils décident de soutenir, et il y a les méchants : le camp d’en face, les adversaires. Le tout c’est de prouver que c’est l’adversaire qui a plus de massacres à son actif. Peu importe ce que son homme politique fait, il ne faut surtout pas en parler. La neutralité n’existe pas avec ces gens, ou on prêche pour leur chapelle ou on est contre eux.

Un média n’est bon que quand il dénonce les crimes du camp ennemi. S’il ose relater un fait qui concerne le camp des internautes militaires c’est la foudre des commentaires haineux qui s’abat sur ce média, ses journalistes et le lobby reptilien : judéo-maçonnique, gay et extra-terrestre qui se cache derrière cette information ayant pour seul but de dénigrer « leur homme politique préféré et leur pays. ».

En Centrafrique par exemple, nous avons les pro-antibalaka opposés aux pro-Seleka . Ils aiment leurs milices respectives au point de se livrer à de véritables concours sur le web pour prouver qu’elle massacre moins que ceux d’en face. Le but c’est qu’il ne faudra pas que leur leader préféré ( Bozizé ou Djotodja) aille devant la Cour pénale internationale. Il ne faut surtout pas désarmer les miliciens qu’ils supportent sinon, ben voilà ils l’avaient dit cette communauté internationale roule pour le camp adverse.Francois Bozize, Michel Djotodia

En Côte d’Ivoire, la situation est quasi similaire. Nous étions une douzaine de journalistes africains invités par le ministère hollandais des Affaires étrangères pour une visite à La Haye. Lors d’une rencontre avec des étudiants en journalisme de cette ville, quatre confrères ivoiriens affirment ce qu’un autre Ivoirien m’avait déjà dit à Paris : « Chez nous la presse est divisée en pro-Gbagbo et pro-Ouattara, et c’est comme ça. » Period.

Interloqué j’ai répliqué : « Mais vous ne vous rendez pas compte que c’est vous qui alimentez le climat de haine et freinez la réconciliation dans votre pays ».

Même certains intellectuels africains militent pour que des tyrans africains ne soient plus poursuivis par la CPI. Pendant qu’on y est, qu’ils nous disent aussi que l’Afrique devrait être fière d’Hissein Habré, qu’Omar El Bechir est un héros au Darfour, qu’on élève des statuts pour honorer la mémoire d’Idi Amine Dada, Jonas Savimbi et Jean Bedel Bokassa, eux au moins ils nous fouettaient correctement de leur vivant. Non, mais sérieux, quand tout ce beau monde s’indigne que la plu part des clients de la CPI sont des Africains vous croyez vraiment qu’ils le disent parce qu’ils veulent une justice équitable ? Ou juste parce qu’après vous avoir bien niqués ? ils veulent protéger leurs arrières ? Demandez aux victimes des coups d’Etat, des massacres et des génocides si leur seul rêve n’est pas la justice peu importe d’où elle vient.

Lors de cette visite à La Haye, nous avons fait le tour des instances de la justice internationale. La très contestée CPI est la toute dernière née d’entre elles. Bien avant sa création il y a très longtemps qu’existe la Cour Internationale de Justice qui a mis fin à la guerre entre le Nigeria et le Cameroun en rendant un jugement dans l’affaire de la presqu’île de Bakassi et qui a aussi été saisie par le Djibouti dans l’affaire Borrel contre la France. Il y a bien longtemps qu’existe la Cour permanente d’arbitrage qui a réglé un différend entre l’Ethiopie et Djibouti à propos d’une ligne de chemin de fer. Aucun politique africain n’a jamais prêché pour que les Africains quittent ces deux juridictions internationales, au contraire ils les ont maintes fois saisies pour régler des différends qui les opposaient aux nations plus fortes.

Au-delà des manquements évidents, des modes de saisine et du temps des procédures qui sont à améliorer, la CPI devrait être perçue comme une chance par les victimes africaines. Sans la CPI, certains Africains n’auraient sans doute jamais vu leurs bourreaux répondre de leur crime, un jour, devant la justice. Ce ne sont pas les exemples qui manquent. Et d’un autre côté, les accusés sont au moins sûrs qu’ils pourront se défendre devant une justice réunissant toutes les conditions. Au lieu de militer pour sortir de la CPI, les Africains devraient peut-être militer pour que les responsables de crimes contre l’humanité et crimes de guerre impunis soient arrêtés. A-t-on déjà vu des Serbes, militer pour leur retrait de la CPI parce que Milosevic y avait été jugé ?

Déclaration de la Procureure Fatou Bensouda sur la crise en RCA

Ces usines à conneries qui polluent le web

Enfin, dans ce décor l’on ne peut que déplorer la décadence des médias participatifs. Les blogs, Facebook, Youtube, etc., sont devenus de véritables usines à conneries qui essaient  de  faire croire que Barrack Obama a des gardes du corps extraterrestres, que la tuerie de Charly Hebdo a été commanditée par l’Elysée avec la complicité de quelques Martiens… Et la marmotte elle met le chocolat dans du papier alu.


OIF : les échanges que je n’ai pas pu avoir avec Michaëlle Jean

Alternance démocratique, bonne gouvernance, Etat de droit, concept genre, etc. Toutes les organisations internationales ont mis ces cordes à leur arc. Les associations et ONG en ont fait leurs chevaux de bataille et les citoyens du monde, à l’instar des manifestants de Hong Kong, parce que vivant désormais dans un village planétaire revendiquent ces droits inaliénables à tout être humain. Dans ce décor, où se positionne l’Organisation internationale de la Francophonie ? Deux évènements récents m’ont emmené à me poser un tas de questions sur la francophonie.

J’ai d’abord été convié le 9 octobre 2014, à un petit-déjeuner de presse organisé par Michaëlle Jean, candidate au poste de secrétaire général de l’Organisation internationale de la Francophonie. Une semaine plus tard, j’ai eu l’occasion de participer à une réunion de réflexion collective sur le processus de transition en Centrafrique. Une initiative de l’ONG International Crisis Group en collaboration avec le ministère français des Affaires étrangères. Je fus surpris de n’avoir pas été le seul à suggérer dans mon intervention qu’il faudrait peut-être que la médiation de la crise centrafricaine revienne à une organisation comme l’OIF…

Tout d’abord quand on est ressortissant d’un pays francophone, il faut être d’une grande mauvaise foi pour prétendre ne pas être au courant des actions de l’OIF en faveur de l’Etat de droit, de la démocratie, de la promotion de la culture, etc. L’apport combien important de l’OIF dans le financement et l’organisation des élections en est un exemple.

N’importe quel citoyen de l’espace francophone a déjà entendu parler des bourses de la francophonie, des jeux de la francophonie, etc. En reconnaissant tous les efforts de cette organisation ; je me suis quand même posé la question de savoir, en réalité à quoi sert la francophonie ?

La France ou la Francophonie ?

C’est le discours de la Baule prononcé en 1990 par François Mitterrand qui a sonné le tocsin sur la fin des partis uniques et lancé le début de la démocratie en Afrique francophone. Vingt-quatre ans plus tard qu’en est-il de cette démocratie dans l’espace francophone ? Doit-on légitimement dire qu’en Afrique, les pays francophones sont les mauvais élèves de la démocratie ?

Quand j’ai demandé la médiation de l’OIF pour la Centrafrique, je suis parti du constat que la quasi-totalité des Chefs d’Etat de la sous-région Cémac (Communauté économique et monétaire des Etats de l’Afrique centrale) sont arrivés au pouvoir à la faveur d’un coup d’Etat et jusque-là gagnent systématiquement par l’opération du Saint-Esprit toutes les élections qu’ils organisent.

Au Tchad, Idriss Déby est au pouvoir depuis 1991. Le Congolais Denis Sassou Ngesso depuis 1979, Paul Biya est en poste au Cameroun depuis 1982, au Gabon Ali Bongo a été élu pour succéder à son père suite à des élections controversées. Les acteurs de la crise centrafricaine ont fait le tour de ces capitales sous-régionales sans trouver de solutions. Pis, Seleka et anti-balaka, du moins leurs responsables jouissent de soutiens dans certains pays frontaliers. Il nous faut un médiateur fort, capable de taper du poing sur la table et rappeler tout ce beau monde à l’ordre avec un discours du genre : « Assez joué, on passe au respect de la feuille de route de la transition. » Et je n’ai pas été le seul à penser que l’OIF pourrait valablement jouer ce rôle. On aurait aimé que l’OIF s’implique davantage, qu’elle pèse plus que la France au sein de ses Etats membres. Car finalement, les relations France-Afrique (ce n’est pas un jeu de mots) au-delà du fait qu’elles sont historiques, sont souvent regardées comme du néocolonialisme, très critiquées (et pas qu’à tort). Or, une organisation dont la France est membre au même titre que les autres Etats membres, pourrait valablement veiller à l’éthique, et au respect des règles qui régissent la vie au sein de son espace et de ses Etats partis. Comment donner plus de poids à l’OIF qu’aux collectivités régionales : CEMAC ( Communauté économique des Etats de l’Afrique centrale), Communauté économique des Etats de l’Afrique de l’Ouest, etc. Si elle paye notamment pour les élections et autres, au-delà des condamnations d’usage, ou du fait de suspendre le pays membre quand il y a coup d‘Etat l’OIF pourrait faire mieux pour garantir le respect de la démocratie en son sein.

L’OIF : une organisation excluante ?

La libre circulation des personnes et des biens dans l’espace francophone demeure un réel souci. J’ai dû remplacer au pied levé une blogueuse ivoirienne invitée par la mairie du Kremlin-Bicêtre pour une résidence culturelle et à qui l’ambassade de France en Côte-d’Ivoire a refusé le visa. Il existe un tel fossé entre les pays francophones que se posent de véritables problèmes d’échanges, non seulement culturels et de libre circulation, mais encore de partenariat gagnant-gagnant et bien plus encore. Aujourd’hui il est plus facile pour un étudiant africain francophone d’aller étudier en Chine, en Turquie ou au Brésil qu’au Canada ou qu’en France. Quand on partage la même langue qu’une personne on est de facto plus proche, parce qu’on peut se comprendre, on peut échanger, discuter et trouver ensemble le chemin à suivre. De véritables efforts devraient être consentis pour réduire ces clivages entre les Etats membres de la francophonie. La petite Camerounaise qui vend ses marchandises au marché d’Edéa, le paysan de la ville d’Abomey au Bénin, le cultivateur de Bobo Dioulasso au Burkina F aso se sentent-ils francophones ? En quoi se sentent-ils impliqués ? Que fait l’Organisation pour ne pas rester une organisation d’intellectuels ? img_52287_michaelle-jean-je-suis-candidate-pour-diriger-la-francophonie

Et qu’en est-il de la place de la femme dans l’espace francophone ? Il n’y a jamais eu de femme à la tête d’un Etat francophone. Celle qui dirige la transition en Centrafrique n’est pas présidente de la République élue au suffrage universel. Elle a été désignée Chef d’Etat de la transition, et là encore en peu de temps elle réédite les mêmes exploits que tous ses prédécesseurs à tel point que même les groupes armés réclament sa démission. Ce qui conforte l’idée d’absence de leadership dans la junte féminine francophone. En Afrique anglophone on peut citer Joyce Banda au Malawi et Ellen Johnson Sirleaf au Liberia, ailleurs il ya la présidente du Brésil pour ne citer que celles-là. Et puisque les pays francophones battent le record des soulèvements armés, l’on sait que ces derniers ne se font jamais sans viols, rapts, etc.

Evoquons l’implication des jeunes dans la gestion des Etats francophones et la place de la jeunesse dans les instances de prise de décisions à l’échelle internationale. Il suffit de voir Abdelaziz Bouteflika, Blaise Campaoré ou de penser aux défunts Houphouët-Boigny, Gnassingbé Eyadéma (remplacé à sa mort par son fils Faure) et Omar Bongo Ondimba, de regarder l’âge des ministres des pays francophones pour comprendre que les Etats membres de la francophonie ont encore du chemin à faire à ce niveau-là. On ne passe pas la main à la jeunesse, même dans les organisations internationales. On met en avant la question de l’inexpérience pour écarter les jeunes quand il s’agit de nommer à des postes de responsabilité.

Tout en rendant hommage à Abdou Diouf et son équipe pour les avancées considérables dans la promotion de la démocratie, on a envie de dire à l’OIF qu’elle doit s’impliquer davantage au sein de ses Etats membres pour remettre les pendules à l’heure. En novembre prochain, dans la capitale sénégalaise l’OIF désignera son nouveau secrétaire général. Autour de quelle candidature se fera le « consensus » ?

 

 

 


L’Afrique face à Ebola : les vérités qui blessent

De Guinée-Conakry au Liberia, du Ghana à la Sierra Leone, l’Afrique est mise à mal par la fièvre hémorragique Ebola. Au total, 3091 personnes sont déjà mortes en Afrique sur près de 7.000 contaminés et l’Organisation mondiale de la santé estime qu’environ 20 000 personnes seront contaminées d’ici le mois de novembre.

« Ebola n’est plus une épidémie, mais une crise humanitaire majeure qui va durer » affirme le chercheur belge Peter Piot codécouvreur du virus depuis l’année 1976. Pourquoi trois décennies plus tard le monde est toujours impuissant face au virus d’Ebola ? Quel est le plan de riposte du continent africain vis-à-vis de l’épidémie ?

La réponse internationale

Il n’existe aujourd’hui aucun vaccin préventif encore moins un remède à titre curatif contre le virus de la fièvre hémorragique Ebola. Or la faisabilité n’est pas impossible, il faut juste y mettre la volonté et les moyens. Des recherches ont été menées pour aboutir à des traitements expérimentaux, cependant aucun de ces remèdes n’est passé la phase clinique qui il faut le reconnaître est très coûteuse.

L’industrie pharmaceutique et les recherches scientifiques nécessitent de gros financements. Il ne faut pas non plus se leurrer sur l’aspect du profit ou des bénéfices. Jusque-là, Ebola est un problème africain, et les Africains n’ont pas les moyens de payer les traitements. En général, ils les reçoivent en dons quand il s’agit de grandes épidémies. Des traitements pour certaines maladies plus compliquées qui sévissent en Occident ont été trouvés, parce qu’on y a mis les moyens et la volonté et parce que les industries pharmaceutiques savent que les Occidentaux sont capables de payer pour leur santé. Les chercheurs ont laissé leur traitement contre Ebola en phase expérimentale faute de moyens et personne ne s’est soucié de mener les recherches coûteuses jusqu’au bout. Ceci malgré le fait que la fièvre Ebola avait déjà frappé en Afrique par le passé notamment en République démocratique du Congo et que le continent n’est pas à l’abri d’une nouvelle épidémie.

Avec le premier cas détecté aux Etats-Unis, et plus récemment en Espagne et toute la vague d’hystérie que cela a provoquée, peut-on légitimement et sans cynisme affirmer qu’enfin, il va y avoir une mobilisation plus concrète pour une réponse efficace contre la pandémie d’Ebola ? D’un côté faut-il dédouaner les Africains et mettre cette impréparation face à l’épidémie sur le dos des chercheurs et de l’Occident ?

L’Afrique : un continent d’éternels assistéstexte_alt_jlevir00152_gr5

Admettons qu’il n’y ait pas eu ces cas de contaminations détectés en Occident, les dirigeants africains regarderaient-ils Ebola décimer tout le continent ? L’Afrique n’investit pas dans la recherche scientifique, encore moins dans l’industrie pharmaceutique. Les Africains sont-ils condamnés à attendre que toutes les solutions viennent de l’Occident ? L’argent du pétrole, des diamants et autres richesses du sous-sol des pays africains serviraient à quoi si tous les Africains meurent décimés par la maladie? Comment expliquer par exemple que la France qui a déjà toutes les structures sanitaires de base, les Français ayant quasiment tous la couverture sanitaire universelle, consacre tout de même un plus gros budget à la santé qu’un pays comme la Guinée qui meurt à petit feu d’Ebola ? Comment expliquer que l’Afrique, le continent le plus infecté par le VIH est celui qui investit le moins dans les recherches de remède contre le VIH ? Comment cautionner qu’un chef d’Etat africain soit capable d’être milliardaire, d’investir dans l’armement, etc., mais incapable de protéger sa population en mettant en place les structures adéquates de santé publique ? Comment expliquer que la plupart des chefs d’Etat africains vont se soigner en Occident quand ils tombent malades ?

Ça n’arrive pas qu’aux autres

Dans ce contexte de mondialisation où l’on parle de village planétaire, il est vital de s’enquérir de ce qui se passe chez le voisin. La libre circulation des personnes et des biens, les échanges et autres transactions ont vite fait d’importer chez soi un problème que l’on croit lointain. L’heure est à la mobilisation, il est aujourd’hui important que le monde tire les conséquences des « petites insouciances » face à Ebola, des « petites insouciances » qui ont conduit à une situation que personne ne semble maîtriser.

 

 


A la découverte de la médiathèque du Kremlin-Bicêtre

L’un des bâtiments emblématiques du Kremlin-Bicêtre est sans aucun doute sa médiathèque. C’est un immeuble à la couleurs rutilante qui se dresse fièrement en face du plus grand centre commercial de la ville. Ce dernier trône majestueusement dans le ciel kremlinois, surplombant tout le paysage aux alentours.

Espace de cybercafé, livres, bandes dessinées, DVD on trouve un peu de tout dans cette médiathèque. On y côtoie des jeunes, des adultes, des lycéens et même des nourrissons.

Je m’y suis rendu dans l’après-midi du 1er octobre, en principe pour assister à une animation jeunesse. Je suis finalement tombé amoureux de cet endroit et c’est pourquoi je veux vous le faire découvrir.

Juste après cette visite guidée, je suis allé m’asseoir aux côtés d’un groupe de jeunes enfants. Les yeux écarquillés, ils écoutaient une animatrice leur lire des contes qui les entraînaient dans les forêts africaines, sur les montagnes russes et dans les marchés chinois.

Suivez toute la visite guidée en audio ici :

Si vous passez dans le coin, un détour à la médiathèque du Kremlin-Bicêtre vaut vraiment le coup.