L’Afrique face à Ebola : les vérités qui blessent
De Guinée-Conakry au Liberia, du Ghana à la Sierra Leone, l’Afrique est mise à mal par la fièvre hémorragique Ebola. Au total, 3091 personnes sont déjà mortes en Afrique sur près de 7.000 contaminés et l’Organisation mondiale de la santé estime qu’environ 20 000 personnes seront contaminées d’ici le mois de novembre.
« Ebola n’est plus une épidémie, mais une crise humanitaire majeure qui va durer » affirme le chercheur belge Peter Piot codécouvreur du virus depuis l’année 1976. Pourquoi trois décennies plus tard le monde est toujours impuissant face au virus d’Ebola ? Quel est le plan de riposte du continent africain vis-à-vis de l’épidémie ?
La réponse internationale
Il n’existe aujourd’hui aucun vaccin préventif encore moins un remède à titre curatif contre le virus de la fièvre hémorragique Ebola. Or la faisabilité n’est pas impossible, il faut juste y mettre la volonté et les moyens. Des recherches ont été menées pour aboutir à des traitements expérimentaux, cependant aucun de ces remèdes n’est passé la phase clinique qui il faut le reconnaître est très coûteuse.
L’industrie pharmaceutique et les recherches scientifiques nécessitent de gros financements. Il ne faut pas non plus se leurrer sur l’aspect du profit ou des bénéfices. Jusque-là, Ebola est un problème africain, et les Africains n’ont pas les moyens de payer les traitements. En général, ils les reçoivent en dons quand il s’agit de grandes épidémies. Des traitements pour certaines maladies plus compliquées qui sévissent en Occident ont été trouvés, parce qu’on y a mis les moyens et la volonté et parce que les industries pharmaceutiques savent que les Occidentaux sont capables de payer pour leur santé. Les chercheurs ont laissé leur traitement contre Ebola en phase expérimentale faute de moyens et personne ne s’est soucié de mener les recherches coûteuses jusqu’au bout. Ceci malgré le fait que la fièvre Ebola avait déjà frappé en Afrique par le passé notamment en République démocratique du Congo et que le continent n’est pas à l’abri d’une nouvelle épidémie.
Avec le premier cas détecté aux Etats-Unis, et plus récemment en Espagne et toute la vague d’hystérie que cela a provoquée, peut-on légitimement et sans cynisme affirmer qu’enfin, il va y avoir une mobilisation plus concrète pour une réponse efficace contre la pandémie d’Ebola ? D’un côté faut-il dédouaner les Africains et mettre cette impréparation face à l’épidémie sur le dos des chercheurs et de l’Occident ?
L’Afrique : un continent d’éternels assistés
Admettons qu’il n’y ait pas eu ces cas de contaminations détectés en Occident, les dirigeants africains regarderaient-ils Ebola décimer tout le continent ? L’Afrique n’investit pas dans la recherche scientifique, encore moins dans l’industrie pharmaceutique. Les Africains sont-ils condamnés à attendre que toutes les solutions viennent de l’Occident ? L’argent du pétrole, des diamants et autres richesses du sous-sol des pays africains serviraient à quoi si tous les Africains meurent décimés par la maladie? Comment expliquer par exemple que la France qui a déjà toutes les structures sanitaires de base, les Français ayant quasiment tous la couverture sanitaire universelle, consacre tout de même un plus gros budget à la santé qu’un pays comme la Guinée qui meurt à petit feu d’Ebola ? Comment expliquer que l’Afrique, le continent le plus infecté par le VIH est celui qui investit le moins dans les recherches de remède contre le VIH ? Comment cautionner qu’un chef d’Etat africain soit capable d’être milliardaire, d’investir dans l’armement, etc., mais incapable de protéger sa population en mettant en place les structures adéquates de santé publique ? Comment expliquer que la plupart des chefs d’Etat africains vont se soigner en Occident quand ils tombent malades ?
Ça n’arrive pas qu’aux autres
Dans ce contexte de mondialisation où l’on parle de village planétaire, il est vital de s’enquérir de ce qui se passe chez le voisin. La libre circulation des personnes et des biens, les échanges et autres transactions ont vite fait d’importer chez soi un problème que l’on croit lointain. L’heure est à la mobilisation, il est aujourd’hui important que le monde tire les conséquences des « petites insouciances » face à Ebola, des « petites insouciances » qui ont conduit à une situation que personne ne semble maîtriser.
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